Matthieu BRABOSZCZ est le co-auteur de la Murder Party “La Doctrine Mac Beck”, qui a été jouée en décembre 2001 avec la participation de Tchernobyl Pictures. Joueur invétéré, Matthieu BRABOSZCZ a accepté de répondre à nos questions.
Murder2000 : Bonjour. Depuis combien de temps connaissez vous les Murder Parties ?
Matthieu BRABOSZCZ : J’ai débuté dans le monde des murders en 1996, ce qui commence à dater, avec les productions Sans Peur et Sans Reproche. On avait décidé avec un groupe d’amis de se lancer un nouveau défi, et l’un d’entre nous fut désigné volontaire pour organiser notre première soirée enquête.
Murder2000 : Quelle a été votre première Murder Party ?
M.B. : Ce fut l’excellentissime “Ivresse des Profondeurs” (anciennement produite par SPSR). C’est une soirée enquête qui se déroule en huis clos dans un sous-marin sur 5 heures, pour environ 7 joueurs et un organisateur. Je dis environ parce qu’à l’époque le recrutement fut difficile et que nous avons fini par jouer à 6 ! (orga compris) Ce fut une expérience inoubliable que nous avons tôt fait de retenter avec le reste des produits SPSR.
Murder2000: Qu’est ce qui vous plait dans les murder parties ?
M.B. : Hum, elle est complexe celle là ! (rires) A vrai dire, la même chose qui m’attire dans tous les loisirs où l’imagination des participants est mise à l’épreuve. C’est à la fois un subtil mélange entre des frissons contrôlés, une quête et un bon scénario. J’éprouve déjà ce genre de sensations avec un bon livre ou autour d’une table de jeux de rôles. Pour ce que j’ai pu voir des “Grandeur Nature”, cela s’en approche également beaucoup. Le problème c’est qu’en lisant un roman policier, vous êtes seul à en profiter. Les murders sont avant tout un bon prétexte pour en profiter à plusieurs, avec des personnes n’ayant pas forcément de points en commun.
Murder2000 : Parlez nous un peu de vous…
M.B. : Prénom Matthieu, nom Braboszcz, né à Ste-Foy-Les-Lyons (France) en 1981 dans une famille d’origine lointaine Polonaise et venue s’installer sur Lyon après une enfance dans le Pas de Calais. Étudiant en informatique depuis 3 ans, à la FAC cette année (ce qui explique le temps libre pour l’organisation de murders), je vis dans un deux pièce sur Lyon en compagnie de Pépé mon furet de combat apprivoisé. Quand je décolle mon nez de l’écran, je côtoie des individus nocturnes avec qui je prends des kilos autour de jeux de plateaux divers, de parties de jeux de rôles interminables et de soirée vidéo. Une amie charmante essaye de suivre mon rythme de vie désarticulé depuis un an et supporte les humeurs de mon furet tout en se lançant elle aussi dans les murders. Je ne passe pas un jour sans coucher dans un coin une idée de scénario pour divers univers de jeux et envisage de plus en plus sérieusement à me remettre à la Murder Party de manière plus constante. Voilà un peu caricaturé mon petit train train quotidien (je ne vais pas entrer plus dans les détails, je suis très pudique comme garçon)…
Murder2000 : Quelles sont les principales différences qui vous font préférer une Murder Party à un jeu de rôles ?
M.B. : Héhéhé, j’aurais peut être été plus aidé en répondant à la question inverse. Disons simplement que la rareté fait le plaisir, qu’il est plus difficile de réunir autant de joueurs pour une murder et qu’en générale cela se ressent sur la qualité de la prestation. Pour détailler un peu plus, on peut distinguer deux types de plaisir totalement différents en murder: celui des organisateurs et celui des joueurs.
Organiser de A à Z une Murder Party est très excitant (sisi!). Le plaisir est grand lors de la préparation et le fait de voir ensuite évoluer les joueurs dans son propre univers est très gratifiant et décuple encore le plaisir de la création. Pour le joueur, c’est bien souvent aux compétences des organisateurs que le plaisir est dû. Pour m’être carrément ennuyé lors d’une soirée enquête mal gérée (et je reste poli) je trouve que cela dépend beaucoup du scénario.
Ensuite, le plaisir vient de l’immersion complète dans l’univers de jeu, ce qui également possible aux jeux de rôles mais parfois bâclé par certains maître de jeu (celui qui dirige une partie de jeux de rôles). Le fait de se déguiser amuse également beaucoup de monde! C’est un excellent moyen de se préparer à son personnage que de passer deux heures à confectionner son costume. Pour finir, je dirai que je ne préfère pas la murder au jeux de rôles, ces deux loisirs sont totalement distincts et n’ont en commun qu’un scénario et un squelette d’organisation plus ou moins semblable. Je trouve un peu dommage qu’on en vienne à les comparer car j’adore les deux. Donc: Vive les murders et Vive le JDR ! :o)
Murder2000 : Pourquoi les plaques d’égouts sont-elles rondes ?
M.B. : Pour que les Tortues Ninjas puissent plus facilement s’y jeter ! On doit cette étrangeté au ancêtre d’une guilde de voleurs qui utilisaient déjà à leur époque des carapaces de tortues géantes pour se protéger. L’un de leur membres était maître architecte de la ville de Rome et profita donc de sa position pour équiper l’ancien système d’égouts de plaques rondes. Voilà pour l’explication officieuse, celle que l’on cache au grand public depuis déjà trop longtemps. Mais alors on est en droit de se demander pourquoi les cuvettes de WC sont rondes également. Je ne m’étendrai pas trop sur ce point de peur d’attirer sur moi les agents de la protection intérieure et du contre-espionnage. Merci de ta compréhension.
Murder2000 : Quand et pourquoi as tu écrit ton premier scénario de murder ? Étais-tu seul ? Pourquoi ?
M.B. : Officiellement parce qu’il existe une tradition à l’association Tchernobyl Pictures (dont je fais partie) qui veut que chaque hiver une murder soit organisée. Officieusement parce que je suis encore jeune et stupide et qu’à l’époque je ne me rendais pas encore compte du boulot que cela représentait ! ;o) Ce fut en septembre 2001 que le projet fut lancé d’organiser une murder de 3° génération pour le courant décembre. Le travail sur papier lui ne commença que vers la fin octobre ! Heureusement, je n’étais pas seul sur le coup, et Thierry m’a beaucoup aidé en acceptant le rôle de second organisateur. Crois moi, créer de bout en bout une murder en si peu de temps, ce n’est pas un boulot pour une seule personne ! Je crois que nous avons réalisé du bon travail pour deux personnes débutantes dans l’organisation et de surcroît avec une date butoir à moins d’un mois et demi.
Murder2000 : Quelles ont été les deux plus grosses difficultés à surmonter ?
M.B. : Les premières difficultés sont au niveaux du scénarios. Avec Thierry le problème était différent, il ne s’agissait pas d’un problème de création, mais réellement de savoir quel scénario allait être joué! Pas moins de 4 scénarios se présentaient à nous, et il a fallu choisir et vite ! Donc si vous avez un temps soit peu de méthode et d’imagination, la création n’est pas un problème majeur. Non, LA grande difficulté est l’organisation en elle-même et le fait de réunir à une même date 15 personnes pour un même évènement. Pour avoir essuyé 2 abandons de dernière minute à une semaine du jour J et avoir galéré pendant un mois avec pas moins d’une soixantaine de mails échangés, je sais de quoi je parle ! (NDLR : nous aussi ! chapeau !!!)
Ensuite, la seconde difficulté est la création des dossiers joueurs, ceux qui indiquent clairement aux joueurs ce qu’ils connaissent de l’histoire. Là contrairement à ce que nous pensions, l’imagination et la motivation ne servent plus autant qu’une bonne méthode de travail et un sérieux de TRÈS haut niveau! :o) Dans le cas de la “La Doctrine Mac Beck” que nous avons organisé avec Thierry le 15 Décembre dernier, tous les problèmes étaient décuplés par le fait que tout prévoir en UN mois pour 15 personnes est très très difficile et complexe ! Je me rappellerai toujours cette fameuse semaine où nous avons passé plusieurs nuits blanches à écrire les dossiers de jeu à moins de 5 jours de l’échéance de leur envoi ! Les aides de jeu ont aussi été très longues à produire. Là j’étais seul et pendant 48 heures non-stop j’ai entrepris d’imprimer et de découper pas loin d’une centaine de feuilles… un enfer quand on sait que tout devait être prêt au terme de ces deux jours… Donc le maître mot pour en finir c’est ORGANISEZ VOUS ! Sinon, pas la peine de pouvoir “organiser” quelque chose pour les autres si vous même vous n’arrivez pas à vous y retrouver.
Murder2000 : L’effort a-t-il été récompensé ?
M.B. : OUI ! Je crois que je ne pourrai jamais exprimer avec des mots le plaisir que nous avons eu à joueur ce scénario qui nous a longuement maintenu éveillés à des heures impossibles. Le plaisir était largement au niveau de l’effort fourni, et je crois que c’est cela qui me poussera à renouveler au plus vite l’expérience de l’organisation: 1 mois et demi impossible à vivre (je ne te parle même pas de mes résultats scolaires sur cet période !) pour moins de 24 heures de jubilation intense ! Je crois que si je continue à décrire toutes les sensations que cela produit je serai censuré… (NDLR : ah bon ? on n’est pas comme ça nous…)
Murder2000 : Qu’est ce qui est le plus important dans une Murder Party ? Pourquoi ?
M.B. : Se faire plaisir. Ceci vaut tout aussi bien pour le joueur que pour l’organisateur. Si à un moment précis il y a un élément susceptible de nuire au plaisir du groupe, il doit être immédiatement supprimé et remplacé par autre chose (je parle pour l’organisation, là). Se faire plaisir à plusieurs, avec des gens que vous ne connaissez en fin de compte que très peu et ainsi nouer des liens très particuliers qui, à mon avis, ne peuvent être créés d’aucune autre façon, que ce soit pendant ou après la partie.
Murder2000 : Sur quel point les nouveaux joueurs ont-ils le plus de difficultés ?
M.B. : Je crois que l’enfer pour le joueur débutant est le joueur possédant plus d’expérience. Je ne détaille pas plus maintenant mais je t’invite à lire ma prochaine thèse intitulée “Comment faire en sorte de rendre plus intelligent et plus sociable le joueur vétéran des murders party”.
M2k : Une petite exclu sur son contenu ?
M.B. : Tu l’auras lorsque j’aurais fini de corriger les fautes d’orthographe! :o) Plus sérieusement, c’est un problème qui me tient personnellement à coeur. Suite à la dernière murder, j’ai vraiment été frappé et attristé par ce phénomène. Un point à régler urgemment avant la prochaine murder dont l’un des objectifs secondaire sera sûrement en rapport avec ce problème…
Murder2000 : À quoi pourrait ressembler la murder idéale ?
M.B. : Une murder facile d’accès où l’accent est mis sur le dialogue et l’entraide entre joueur. Une murder qui casserait les habitudes de tout le monde (et des vétérans) pour que l’expérience soit réellement nouvelle pour tous. Mon cher Olivier, vous nous avez longuement mis en garde contre les joueurs de jeux de rôles pendant les murders party, mais je crois que l’ “Homo Veterantus” (appelé aussi “vieux routiers des murders party”) est aussi un animal empli d’habitudes et de préjugés contraires à la mise en place d’une vraie ambiance digne de ce nom !
Murder2000 : Quels seraient les conseils donner à un futur organisateur ?
M.B. : De bien observer en début de projet les cartes qu’il a en main et jusqu’où il veut aller. En cours d’écriture et d’organisation, on est toujours tenté de faire plus. Plus d’idées, plus d’intrigues, plus de décors, plus de joueurs. Malheureusement, contrairement au théâtre ou à l’organisation de soirée, aucun de ces éléments n’est fixe et peuvent évoluer au cours de la réalisation. Je pense qu’une bonne organisation doit se préparer à 50% avant même de lancer la nouvelle d’une murder aux joueurs. Ensuite, on s’adapte, notamment sur le nombre réel de joueur. Mais surtout, ne rien lâcher aux futurs joueurs tant que la moitié du projet ne soit terminé !
Murder2000 : Pourquoi les orgas ne font-ils jamais assez de photos ? (ou : pourquoi faut-il toujours un journaliste parmi les persos)
M.B. : Très juste remarque, Maître Capello ! Les orgas font toujours quelques photos en début de soirée et au débriefing, mais pendant la murder ils n’ont pas le temps et ça nuit à l’Ambiance. Donc, il ne faut pas nécessairement un joueur journaliste, mais plutôt un ou deux joueurs en charge de la caméra et/ou appareil photo pour les grands moments de la murder. (NDLR : ça a déjà été tenté et malheureusement les joueurs aussi ont tendance à s’oublier au profit de l’Ambiance, ce qui n’est pas à blâmer, au contraire, mais au détriment des souvenirs). Le mieux reste néanmoins le gratte papier dont tout le monde connaît le job et qui peut en toute impunité prendre des photos en cours de jeux et cela sans l’aide des orgas.
Murder2000 : Que pensez vous de l’initiative de Murder2000 de rassembler en un seul lieu le plus grand nombre de scénarios pour tous types de joueurs ?
M.B. : Tu veux une réponse franche ou un blabla officiel? :o) Non, ayant de loin contribué un peu au site et étant en permanence connecté dessus quand je cherche l’inspiration de scénarios, je dirai que c’est non seulement une bonne idée mais surtout totalement INDISPENSABLE. Si ça n’existait pas, il faudrait absolument créer un site comme celui-ci.
Murder2000 : Racontez-nous une anecdote, un évènement lors d’une Murder Party ?
M.B. : Je crois que les anecdotes croustillantes sont nombreuses mais celles qui me viennent le plus facilement à l’esprit sont celles de la murder de décembre que j’ai organisé avec mon ami Thierry. Je pourrais te parler des deux heures que nous avons passé ensemble à rechercher 2 joueurs qui avaient littéralement disparus, enfermé dans un placard à balais avec une lampe torche pour étudier un manuscrit fermé à clef… Mais je crois que j’ai vraiment été mort de rire lorsque deux joueurs le lendemain (dont l’un faisait parti du tandem de choc enfermé dans le placard à balais) m’ont avoué être sorti de nuit pour parcourir 3 km sous la neige par -13°C pour aller vérifier avec une carte que j’avais grossièrement réalisé avec un logiciel de DAO si le cimetière (fictif) du village pouvait contenir des informations intéressante pour repousser un fantôme vengeur. Thierry et moi étions mort de rire, eux non! :o)
Murder2000 : Êtes-vous plus souvent scénariste, joueur ou organisateur ?
M.B. : Personnellement, je préfère grandement l’exercice d’écriture à celui de joueur. Que se soit en murder ou au jeu de rôle. Ça ne se discute pas, chacun y trouve ses préférences, mais vu la rareté des manifestations (au nombre de deux par ans); je préfère m’investir à fond dans la murder. Pour le jeu de rôle, c’est un peu différent. L’écriture et le jeu sont des plaisirs plus intenses et immédiats que lors d’une murder.
Murder2000 : Matthieu, merci.